REVOIR. En 1969, le réalisateur John Schlesinger nous emmène à New York et nous fait rencontrer deux outsiders irrésistibles dans le drame "Midnight Cowboy". L'amitié masculine dans des conditions difficiles est fortement représentée.
Les rues de New York n’ont jamais été utilisées aussi efficacement comme lieu de tournage que dans les films américains de la fin des années 60 et jusque dans les années 70. Alliant réalisme, ambiance documentaire et charme sauvage, ces environnements sont devenus emblématiques. L’atmosphère particulière était constamment présente et se mariait comme par magie aux impressions visuelles. Peu de films ont fait de la ville elle-même un élément aussi important de l’histoire et de la façon dont elle est mise en scène que celui-ci.
Dans cette jungle d'asphalte se déroule une représentation touchante de l'amitié masculine entre deux exclus de la société. L'un d'eux vient du Texas et vient d'arriver Joe Buck (Jon Voight) qui est venu à New York pour devenir un prostitué, mais il s'est rendu compte que ce ne serait pas aussi facile qu'il le pensait de devenir l'étalon préféré de toutes les dames de la ville. L'autre est le petit voleur boiteux Enrico Rizzo (Dustin Hoffman) qui tâtonne et se fait appeler Ratso par l'entourage méprisant. Ces personnages captivent immédiatement le cœur.
Le jeu d'acteur de Hoffman est parmi les meilleurs que j'ai jamais vu au cinéma. Il disparaît mentalement et physiquement dans son personnage avec des jambes traînantes et un langage corporel blotti complété par une transformation vocale impressionnante. Voigt mise sur le charme et parvient à nous transmettre son optimisme, même si le duo en vedette est obligé de se battre pour ne pas geler ou mourir de faim. On sait que sa vision lumineuse de la situation repose sur la naïveté, mais on sourit quand même avec lui. L’interaction entre les deux se ressent naturellement dans les moindres expressions échangées.
Compte tenu des conditions de vie dans lesquelles vivent Buck et Rizzo, cela aurait facilement pu être un film dur et sombre à sens unique, mais le scénario deSel Waldoest riche en nuances émotionnelles. La base est constituée de nombreux moments mélancoliques et occasionnels où le sentiment est au centre, mais le rêve d'une vie meilleure est ce qui fait avancer l'histoire. L'obscurité et la lumière se renforcent mutuellement, comme dans la vraie vie, jusqu'à l'une des finales les plus inoubliables de l'histoire du cinéma.
La caméra recherche constamment l'authenticité tant dans sa façon de bouger que dans le manque de couleurs embellissantes dans presque tout le film. Il rejoint les personnages dans l'agitation des rues et est proche d'eux dans l'appartement délabré qu'ils partagent. La mise au point sur les visages est effectuée exactement au moment où cela est nécessaire et chaque expression est capturée avec toute sa force. Tout cela donne l'impression que nous sommes présents dans le film en compagnie des deux amis. Dans une scène de fête entre dandys intellectuels, on utilise une imagerie hallucinatoire qui rappelle avec brio Andy Warhol.
La musique prend du recul pour laisser presque toute la place côté sonore à l'agitation de la ville créée par les voitures et les gens. Cela va bien avec la photo dépouillée. Lorsque les notes prennent le dessus, les oreilles sont gâtées par la belle chanson "Everybody's Talkin'" chantée par Harry Nilsson et à d'autres moments par une mélodie envoûtante interprétée uniquement à l'harmonica. Ce paysage sonore contribue grandement à l’atmosphère qui attire le spectateur dans les images de la première à la dernière image.
Le directeurJohn Schlesingerest un cinéaste qui mérite qu'on se souvienne avec respect et "Midnight Cowboy" est l'un des drames les plus captivants jamais réalisés. Il a une place évidente sur les étagères avec les classiques et peut être vu encore et encore. La note la plus élevée semble être une évidence.